Les quelques lignes que vous allez lire, ont été présentées, annotées et publiées par Abdoulaye Bathily. Elles sont en ma possession de part mon père Dioncounda Boubou Bathily. A partir de ce jour, je vais vous faire plusieurs articles qui sont issus de l’oeuvre posthume jusqu’ici inédite de Ibrahima Diaman Bathily. Ils ont été obligeamment communiqués à Tiyabou (Tuabou) (département de Bakel) en août 1966 lors d’une mission effectuée en compagnie de M. Claude Meillassoux (C.N.R.S) et par le fils de l’auteur, M. Diaman Bathily, directeur de l’école primaire régionale de Bakel, auquel nous nous devons d’exprimer ici toute notre reconnaissance.
Pour commencer cette longue série d’article, je vais faire une présentation de ce grand homme:
Ibrahima Diaman Bathily (1897-1947) après avoir fait ses études primaires dans ce qui était le Soudan français où son père Diaman Demba servait à l’école des fils de chef de Saint-Louis du Sénégal, puis à l’école normale de gorée d’où il sortit en 1917 avec le grade d’instituteur dont il devait, au terme de vingt-sept années passées au service de l’enseignement, gravir tous les échelons. Il enseigna dans plusieurs écoles (17) du Soudan jusqu’en 1942, date à laquelle il fut affecté à la direction de l’école primaire de Pout (Sénégal).
Cette décision faisait suite à une lettre en date du 12 septembre 1942, que Ibrahima Bathily, alors directeur de l’école régionale de Macinz, avait adressée à l’inspecteur général, chef de l’enseignement en A.O.F. Dans cette lettre, il écrivait notamment pour expliquer les raisons de sa requête: « Depuis vingt-cinq ans révolus dont dix huit mois de service militaire comme engagé volontaire pour la durée de la guerre, je crois avoir servi le Soudan, ma colonie d’adoption et d’election, avec toute l’activité, tout le dévouement, tout le désintéressement en mon pouvoir…, père de dix enfants dont plusieurs en bas âge et sentant mes forces m’abandonner, je voudrais regagner mon pays natal où j’essayerai de constituer un réel « chez nous » à mes enfants avant que je sois incapable de le faire.
C’est donc plutôt pour eux que je vous prie, Monsieur l’inspecteur général, de bien vouloir m’aider de tout votre bienveillant concours afin que j’aie une école à Bakel ou dans ses environs immédiats à Gabou par exemple. Tout en travaillant pour l’avenir de mes enfants, je tâcherai de faire profiter à ma colonie d’origine le peu d’activité dont je suis capable en ce moment et le peu d’expérience que je dois à mes nombreux chefs et nombreux postes…. Après deux années de service à Pout, Ibrahima Bathily fut sollicité par les vieux Bathily de Tuabou (ou Tuabou) pour venir dans le Goye inférieur et servir d’intermédiaire entre eux et l’administration coloniale.
Il exprimera d’abord quelques appréhensions quant aux possibilités qu’il avait de pouvoir le plus souvent vivre en bonne intelligence avec ses vieux aînés. Rassuré sur ce point, il accepta finalement et fut nommé en 1944, chef de canton du Goye inférieur avec l’agrément des autorités coloniales satisfaites elles aussi d’avoir comme interlocuteur et agent direct dans cette « turbulente région », non plus un Tounka (roi) traditionnel vieillard impotent, mais un homme jeune dynamique et surtout formé à l’école française.
Dès sa nomination, Ibrahima Bathily s’attacha avec enthousiasme à remplir sa nouvelle charge qu’il considérait un peu comme un sacerdose: » le peuple, écrit-il, doit être éduqué pour demeurer digne de son rôle…Il appartient donc aux guides qu’il s’est donnés pour le conduire vers les formes de la vie collective, de lui montrer que les besoins de chacun sont solidaires des besoins de tous les autres hommes, ses droits de leurs droits et sa liberté de leur liberté…. Si le caractère sacré de la vie individuelle ne peut être mis en doute, l’homme doit en même temps savoir subordonner sa vie à des fins idéalistes qui sont des fins collectives: la justice, la liberté humaine, l’indépendance nationale, la paix alle-même. Cette subordination s’appelle le sacrifice, et une propagande qui ne sait plus l’enseigner s’abaisse et se vulgarise…. »
Texte écrit part une BATHILY coolmiss