Djibril Tamsir Niane: de L’Empire du Ghana à celui du Mali, la civilisation des langues du groupe Mandé

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Je voudrais tout d’abord, Mesdames et Messieurs, remercier Monsieur le Député Maire et ses proches collaborateurs de m’avoir invité à ces Journées culturelles de Sédhiou qui font du Pakao un centre vivant de la civilisation . Il ne s’agit pas seulement d’exhiber, de faire connaître nos chants et danses, mais aussi et surtout d’exposer les éléments matériels de la culture et de réfléchir ensemble dans le cadre du colloque à nos valeurs de civilisation. C’est le lieu de saluer l’initiative des autorités sénégalaises singulièrement le Président Abdou Diouf, d’avoir attiré l’attention sur la nécessité de l’intégration pour nos pays.

En effet, l’échec des indépendances est là, aucun de nos Etats après 30 ans d’exercice de la souveraineté nationale n’a pu décoller.
Il est clair que nos micro-Etats de cinq à six millions d’habitants, de surcroît sous-développés, ne peuvent faire le poids face aux mastodontes euro-américains.
Je salue l’initiative du Gouvernement sénégalais d’avoir créé un Département ministériel dont l’unique but est de chercher les voies et moyens qui mèneront à l’intégration de la sous-région. Un jalon important existe déjà : la CEDEAO qui rassemble francophones, lusophones et anglophones des Etats comptant plus de 150.000.000 habitants. Voilà un ensemble respectable et par son poids démographique et par l’espace qu’il occupe. Et aussi le marché qu’il constitue.

Le présent colloque a son originalité. Nous avons l’habitude d’étudier les cultures et civilisations africaines, mais l’approche proposée par les organisateurs me semble digne d’être souligné. Il s’agit d’étudier la civilisation mandingue comme facteur d’intégration sous-régionale en Afrique de l’Ouest. Approche dynamique s’il en fut puisqu’elle nous demande de questionner le passé pour y chercher les éléments de réponse aux problèmes de l’heure. C’est dans cette perspective que nous avons choisi de parler ici du dynamisme de la civilisation mandingue pour voir comment, à travers le temps et l’espace, les problèmes préoccupants ont trouvé leur solution.

Au plus profond d’une crise quand un peuple s’interroge, il est rare qu’il ne trouve dans les expériences vécues les ressources nécessaires à sa survie. L’Afrique noire se trouve à un moment décisif de son évolution. Ainsi après avoir longtemps gémi sous le joug colonial, nos pays africains ont su trouver les voies et moyens de mettre un terme à la domination étrangère. Cependant après trois décennies d’indépendance, il apparaît aujourd’hui à tous que les options opérées n’étaient pas les meilleures, l’échec est là ; la preuve est faite que les micro-états nés de l’indépendance ne sont pas viables. Il apparaît à tous que la solution à la présente crise se trouve dans l’intégration, la création de vastes ensembles.

Le passé africain recèle-t-il des éléments de réponse à la présente crise ? L’intégration répond-elle à une profonde aspiration des peuples. Avant de répondre à ces questions constatons d’abord qu’à l’heure des indépendances nos dirigeants avaient souvent succombé au mimétisme : les discours fondateurs ont fait défaut, solutions et expériences proposées découlaient non d’une réflexion intérieure, tirées de réalités culturelles et sociales des populations mais d’élucubrations technocratiques jurant avec le génie des populations.
Le primat du modèle extra-africain a été tyrannique au point que bien souvent les dirigeants se sont trouvés en porte à faux avec les données sociologiques qu’une politique clairvoyante obligeait de prendre en compte.

Si de l’histoire, les recherches en sciences sociales ont connu un brillant essor à la faveur des indépendances, force est de reconnaître que les études qui en ont découlées ont rarement servi à fonder le discours politique des Etats – en dehors des proclamations de principes.
Au moment où, après les pères fondateurs, la seconde génération des dirigeants voient dans la dynamique de l’intégration la solution à la présente crise, l’on est en droit de se demander qu’est-ce que le passé de l’Afrique offre-t-il à la réflexion, quelles expériences nos populations ont-elles vécues dans ces domaines.

Là, apparaît l’originalité du thème proposé au présent colloque, à savoir une réflexion sur l’une des plus brillantes civilisations du continent, la civilisation mandingue qui recouvre l’aire soudano-sahélienne concernant neuf Etats de la région.
Comment s’est formé l’espace mandingue, quel dynamique l’a soutenu, comment les populations ont-elles réagi les unes par rapport aux autres dans le cadre tracé ; quels enseignements peut-on en tirer pour fonder une politique nouvelle. Voici quelques questions qui nous aideront à saisir l’esprit de la culture mandingue qui a fécondé le vaste espace que l’on sait.

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