par Rama Yade » Mer Déc 24, 2008 11:49 am
L’écrivain nigerian critique le colonialisme de la langue
Le célèbre romancier nigérian, Chinua Achebe a exhorté ses compatriotes et écrivains contemporains africains à privilégier leur langue maternelle dans l’exercice de leur métier afin d’atténuer les effets néfastes engendrés par le colonialisme aussi bien dans le domaine des lettres que de celui de la culture africaine.
Il a également plaidé pour la renaissance des traditions orales africaines, qu’il considère comme étant exceptionnelles, tout en reconnaissant, cependant, que la tradition du conte oral est en voie de disparition.
S’exprimant au cours de l’émission du week-end de la BBC "The Ticket" dans le cadre du programme : arts, culture et distractions, le célèbre écrivain a affirmé qu’à cause de l’éducation qu’ils ont subi, les écrivains africains de sa génération sont obligés d’écrire dans la langue du colonisateur, pour ce qui le concerne, en anglais, depuis que le Nigeria est tombé sous la domination britannique.
"C’est comme si nous avions le choix, mais en réalité nous n’en avions pas", a martelé Achebe dont le roman "Le monde s’effondre" (1958), qui a été traduit dans plusieurs langues largement parlées, dépeint la confrontation entre cultures africaine et occidentale avec comme cadre son Igboland natal (est du Nigeria).
le colonialisme de la langue
Ce lauréat de plusieurs prix internationaux de littérature et de distinction, a admis que ses collègues et lui étaient victimes de ce qu’il appèle "le colonialisme de la langue", parce que les administrations coloniales ont fait en sorte que les peuples dominés vivent, travaillent et communiquent dans la langue des maîtres colons.
Avant d’insister qu’en cette période post-coloniale, cette vieille tendance doit être renversée afin que les Africains ne continuent plus de perdre leur riche héritage en arts et en culture.
Commençant par lui-même, Achebe a indiqué qu’il s’est assuré que sept de ses oeuvres les plus célèbres ont bien été traduites dans sa langue maternelle Igbo, ajoutant que son roman "Le monde s’effondre" "subira également le même sort si d’ici là, je suis toujours en vie".
La tradition orale en danger
Il a, par ailleurs, souligné que les Africains ne doivent pas permettre que la tradition orale meurt, celle-là qui était largement utilisée dans la période d’avant colonisation et qui est actuellement menacée de disparition, au moment où la tradition "de l’écriture, de la télévision, et de la photographie" a beaucoup évolué.
Une grande partie de l’histoire pré-coloniale du continent africain n’a pas été écrite du fait du mode de transmission orale qui en était faite de génération en génération.
"Plutôt que de rester sur place et de se plaindre", M. Achebe a suggéré que les Africains fassent plus preuve de dynamisme pour la renaissance de leur tradition orale.
Ce géant de la littérature, âgé de 75 ans, vit présentement aux Etats-Unis, où il enseigne et continue d’allonger la liste déjà assez fournie de ses oeuvres littéraires.
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En plus du "Monde s’effondre", les autres grandes oeuvres de Achebe sont entre autres : "No longer at Ease" (1960), "Arrow of God" (1964), "A Man of the People" (1966), "the Trouble with Nigeria" (1984), et "Hopes and Impediments (1988)
Ramata Camara, wesh wesh
« Pourquoi me ferais-je enterrer seule dans un cimetière des Hauts-de-Seine ? ». Ces propos sont signés de Rama Yade, secrétaire d’Etat chargée des affaires étrangères et des droits de l’homme en France. Rama Yade fait part de tout son écartellement entre deux cultures, deux pays, la France et le Sénégal.