Sculpture soninké XIIIe siècle Plateau de Bandiagara, Mali Bois H. 68 cm Musée du quai Branly 73.1977.6.1
Etudiant le style de plusieurs cavaliers en terre cuite issus du delta intérieur du Niger et datés des XIIIe-XVe siècles, Bernard de Grunne a remarqué en 1987 que certains comportaient sur les tempes, comme cette sculpture, une série de scarifications indiquant que ces œuvres représenteraient des Soninké venus avant le XIIIe siècle du sud du Mali dans la région de Djenné. Ces Soninké connaissaient en effet le cheval et, contrairement aux Dogon, les sacrifiaient. Le bois de cette figure a été daté du XIIIe siècle.
Cette œuvre pourrait être l’un des représentants les plus antiques du style soninké. Les deux tubes accolés dans le dos rappellent les carquois de certaines figures en terre cuite montrant des archers. Ces étuis doivent aussi être perçus dans leur relation avec le petit arc que semble tenir le personnage dans sa main gauche.La figure porte sur le bras gauche un couteau, au-dessus du coude, prêt à être saisi de l’autre main.
On peut également voir un lien entre l’ondulation de la statue et le long masque-lame évoquant le serpent exécuté tous les soixante ans lors de la cérémonie du sigi marquant le « renouvellement du monde » chez les Dogon ?Par ailleurs, les figures humaines sculptées, liées à l’autel du binu, peuvent représenter l’un des ancêtres immortels avant sa transformation en serpent, ou une personne réelle fondatrice du culte et créatrice de l’autel local.
Il pourrait s’agir ici d’un fondateur soninké, repérable à ses scarifications et dont les attributs, telle la coiffure en forme d’ogive, témoignant de l’identité et du rang.
Longtemps attribuées aux Dogon, les sculptures de ce style ont à la lumière des découvertes archéologiques dans le delta du Niger et de leur manifeste parenté stylistiques avec les terres cuites de la culture dite ìde Djenné (attitudes, parures…) été attribuées aux Djennenké. Il semblerait aujourdíhui qu’il faille en chercher la création chez les artistes Soninké ayant cherché à représenter ainsi des fondateurs.
Cette théorie d’une antériorité de ces sculptures à l’arrivée des Dogons dans la région s’est trouvée confirmée par les mesures du Carbone 14, la sculpture du Louvre étant datée du 13° siècle, celle de la collection Barbier-Mueller du 14°.
Malgré quelques différences logiques, un faisceau de convergences stylistiques et iconographiques permet d’envisager que cette sculpture puisse être de la même main que celle de l’ancienne collection Loeb, et donc attribuable à l’artiste remarquable qui pourrait être nommé le « Maître Soninké de la collection P.Loeb » pour reprendre l’expression de M. Bouloré dans le catalogue du Louvre.
Toutes les pièces appartenant à ce minuscule corpus présentent des dommages divers et toutes ont subi les outrages du temps au niveau des traits du visage les rendant le plus souvent difficiles à « lire ». Celle ci n’ayant pas échappé à la règle, un de ses précédents propriétaires à pris le parti de faire pratiquer quelques rebouchages (apparemment réversibles), principalement visibles de l’arête du nez, à l’extrémité de la barbe.