La Mauritanie en proie à de l’esclavage. Très critiquée pour son retard en matière de Droit de l’Homme, le pays fait aujourd’hui face à un autre problème plus sérieux : l’esclavage. En effet, les nombreux cas enregistrés prouvent encore les efforts colossaux qui restent à fournir. Les cas liés à l’esclavage ou au racisme recensés ces dernières années font débat. Les rapports ouverts par les ONG en place font état d’une situation extrêmement complexe et très préoccupante pour la population noire vivant dans le pays.
Les Droits de l’homme bafoués
Tout récemment, la République islamique a été indexée pour son manque de respect aux Droits de l’Homme. Pourtant, le dernier rapport de Reporters Sans Frontières vient de placer la Mauritanie en tête sur la liste des pays du Monde arabe en matière de Liberté de la Presse. Cependant, tout n’est pas rose.
Le viol est devenu monnaie-courante. Plus de 800 cas de viols se produisent annuellement selon l’initiative « La-Ibahiya » (anti-libertinage). Sans compter, l’état des prisons et le traitement inhumain auquel sont soumis les détenus. Un problème qui semble ne pas être pris très au sérieux par les autorités.
L’esclavage en Mauritanie : une réalité
L’esclavage est devenu un vrai problème. Un problème tabou dont on parle très peu, mais qui divise toujours la société et indigne profondément la communauté noire.
L’Initiative pour la Résurgence du mouvement Abolitionniste (IRA), une ONG anti-esclavagiste basée en Mauritanie, dénonce des « cas flagrants d’esclavages » découverts dans certaines localités du pays.
Lors de la « Tournée pour la Liberté », organisée le 24 et le 31 janvier dernier, l’ONG signale deux cas d’esclavage à Guérou, localité située à 550 km à l’Est de Nouakchott. Deux enfants de 12 ans sont maintenus dans un état d’esclavage.
Les cas d’esclavage commis sur des mineurs se multiplient. De nombreux activistes qui luttent pour son abolition sont souvent victimes d’emprisonnement. L’exemple de Biram Ould Beid, une des figures de la lutte anti-esclavagiste en Mauritanie, libéré de prison le 3 septembre 2012, n’est que l’arbre qui cache la forêt.
Président de l’IRA et farouche combattant pour la lutte contre l’esclavage en Mauritanie, Biram Ould Beid a en effet été accusé par les autorités mauritaniennes d’avoir symboliquement brûlé des textes esclavagistes datant du 9e au 15e siècle. Une accusation qui lui a valu un emprisonnement le 28 avril dernier.
Les Haratines haussent le ton
Aujourd’hui, les Mauritaniens noirs, encore appelés les Haratines, souhaitent rompre le silence et attirent l’opinion internationale sur l’ampleur du phénomène.
Dans une interview accordée à Afrik.com, Youba Dianka, Mauritanien et membre de l’association l’Organisation contre la violation des Droits Humains (OCVIDH) donne son opinion sur la question. Il explique que l’esclavage reste bien une réalité dans le pays. « L’esclavage est bien une réalité en Mauritanie. Cela est dû à l’histoire. Ce sont des gens (noirs) qui ont été volés à leurs parents et qui aujourd’hui travaillent pour leurs maîtres blancs », précise-t-il.
Youba met en exergue une profonde division de la société mauritanienne. Les richesses sont inégalement réparties entre d’une part les Hassania (les arabes) qui occupent les postes clefs de la société (pouvoir politique, économie, entreprises), et de l’autre les noirs souvent Wolof, Soninké ou autres qui jouent un second rôle.
Pourtant, l’esclavage a été aboli sous toutes ses formes en Mauritanie le 9 Novembre 1981. Il est reconnu comme crime contre l’humanité. Mais la réalité est toute autre.
Trois formes traditionnelles d’esclavage existent toujours dans ce pays : l’esclavage domestique (l’esclavage attaché à son maître pour sa vie entière sans aucun contact avec sa famille), l’esclavage sexuel (pour les femmes qui travaillent pour un maître dont l’autorité est considérée comme naturelle) et enfin l’esclavage agricole (les travaux les plus durs et les plus rebutants sont assignés à l’esclave).
Youba Dianka souligne qu’il n’y a aucune amélioration de la situation et déplore l’absence de rigueur du gouvernement mauritanien qui n’a rien fait pour changer les choses.
De nouvelles lois sont déjà votées par le Parlement en vue d’abolir cette pratique, mais les efforts pour les appliquer ne suivent toujours pas. Entretemps, le phénomène se propage et reste encore une réalité. Les victimes n’osent pas porter plainte par crainte de subir des représailles.