Keïta ! L’héritage du griot : Le patrimoine oral à l’épreuve du temps

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Le film Keïta ! L’héritage du griot du réalisateur burkinabé Dany Kouyaté replace le rôle du griot dans la société africaine avec comme toile de fond l’épopée Mandingue de Soudjata Keïta.

On croirait assister à un film du roman L’Aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane. Tant les similitudes des questions soulevées dans la fiction Keïta ! L’héritage du griot de Dany Kouyaté épousent la problématique de ce classique sénégalais. Le conflit entre l’école traditionnelle où l’enseignement se fait sous l’arbre à palabre par le griot chargé de la transmission du savoir dans la société africaine et celle moderne refait surface dans ce film.

Le vieux griot Djéliba quitte son village pour retrouver en ville le jeune Mabo Keïta, issu de la grande ethnie des mandingues, pour lui raconter d’où vient son nom. Cette mission qu’il entreprend, lui a été donnée dans un songe alors qu’il dormait sur son hamac. Sa famille a toujours été le griot des Keïta. Mabo est captivé par cette histoire de ses ancêtres qui l’édifie sur l’origine de son nom. Il trouve des astuces même pour sécher les cours et revenir à la maison afin de poursuivre son récit avec Djéliba. Sa mère ne l’entend pas de cette oreille. Elle qui estime que Mabo est en classe d’examen de Cm2 et qu’il peut attendre les vacances scolaires pour s’adonner à cette autre enseignement. Deux camps s’affrontent.

Celui du père de Mabo et de Djéliba qui défendent la place de la tradition, de leur héritage dans l’initiation des jeunes africains. Et celui composé de la mère de Mabo et de son maître défenseur de l’école française. Le premier réussira à mener jusqu’au bout son désir de transmettre le legs. Tandis que l’autre n’a pas abouti dans le film. Même si le conflit a été annihilé à la dernière minute. Djéliba a décidé de rentrer lorsque la mère de Mabo a menacé de quitter le domicile conjugal s’il n’avait pas une ferme décision pour régler le problème. Le griot semble perdre sa place au profit de l’enseignement moderne en ces temps qui courent. Une réalité dont le cinéaste veut attirer l’attention des Africains à travers son film.

En toile de fond de cette rivalité, le réalisateur Burkinabé Dany Kouyaté, a retracé l’épopée du Mandé avec le triomphe de Soudjata Keïta, fils de la femme buffle. Une manière pour le cinéaste de se replonger dans son histoire. Car son père Sotigui Kouyaté, à qui, il rend hommage à travers cette fiction et qui a incarné le rôle de Djéliba, a toujours revendiqué cet héritage. Keïta ! L’héritage du griot, un film de plus d’une heure (101minutes), sorti en 1995, captivant, qui fait sourire parfois, est porté de main de maître par Sotigui, celui que l’on surnomme «l’un des plus grands comédiens africains contemporains et acteur fétiche de Peter Brook». Issu d’une famille de griot guinéen, né au Mali et grandi au Burkina Faso, Sotigui Kouyaté a débuté sa carrière en 1966. Il est décédé en 2010. L’Institut français de Dakar lui rend hommage depuis le 23 mars jusqu’au 11 avril prochain en projetant cinq films de différents réalisateurs africains dont il est l’acteur principal.Le film a été récompensé par le prix «Oumarou Ganda» de la meilleure œuvre au Festival panafricain de cinéma de Ouagadougou en 1995.

Fatou K. SENE

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