Il a fallu, sur une chaîne confidentielle peut-être, France 5, dans une émission qui ne titille pas le CAC 40, mais tout de même sur un média national à l’usage de tous, que la députée de Guyane, Mme Christiane Taubira, ramène un peu de lumière dans l’obscurantisme migrophobe qui tient lieu de restauration de l’autorité de l’Etat. Lors de son passage à l’émission Ripostes consacrée à l’immigration et la nouvelle loi en discussion au parlement en septembre 2007, suivant au moins trois autres sans effets notables sur les flux, Christiane Taubira a décapé en règle la politique d’expulsion-excrétion sélective menée par l’Etat-Sarkozy. Avec des arguments de première facture.
Christiane Taubira a commencé par miner l’argument du trop d’immigration et de la politique sous-jacente, non dite visant les flux migratoires africains. En prenant l’exemple du Canada qui a mis sur pied une batterie de mesures positives pour rapprocher les conditions socioprofessionnelles et civiques d’existence des immigrés avec celles des canadiens blancs.
La promotion de l’immigration, la diversité culturelle, menée par ce pays et son ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles a permis à la députée de Guyane de réduire à néant la posture rocardienne passée à la postérité de l’inintégrabilité de la misère du monde. La réussite de la gouverneur générale du Canada, Mme Michaëlle Jean issue de l’immigration haïtienne a servi de point d’illustration concret à sa démonstration. Une petite fille arrivée au Canada avec ses parents fuyant Haïti sous la férule Duvalier devenant la représentante de ce pays auprès de la reine d’Angleterre, parmi bien d’autres réussites éclatantes d’universitaires, d’ingénieurs, etc.
Nzinga Taubira, dans une forme irrésistible a déconstruit le compte truqué des dispositifs contre l’immigration noire africaine, en montrant que c’est par dizaine, et sans résultat, que se comptent les dispositifs tentant d’empêcher les flux de personnes. Ce compte incluait les législations durcies sur les mariages mixtes. Echec d’une politique qui continue de faire semblant de faire du chiffre, et qui ne s’attaque pas à cette autre immigration, des grosses fortunes qui ne se préoccupent pas de parler le français mais dont les acquisitions immobilières tiennent lieu de quitus de bonne francité. De brevet d’intégration. Difficile de dire qu’il ne s’agisse d’une sélection par l’argent et par l’ethnique de l’autre côté.
La députée de Guyane a tenu à revenir à la source des immigrations africaines actuelles, les spoliations dont souffre un continent avec l’appui des grandes firmes et grandes puissances. Ceux qui sont volontiers dépeints par la presse occidentale comme des tyrans et dictateurs omnipotents, omniprésents chez eux ont leurs habitudes dans les palais français et vice-versa. Avec une complicité dans la paupérisation de l’Afrique qui saute aux yeux, la jeunesse a-t-elle vraiment le choix, ce choix est-il accessible ? Si l’aide supposée aux pays en développement recule, que les dispositifs européens ACP sont boudés par les têtes de l’Union, le fossé des inégalités continuera d’être un appel d’air à l’immigration. Rien ne sert de s’en cacher la face, si ce n’est politique spectacle et institutionnalisation, instrumentalisation d’une politique de races, recourant aux ADN, aux manipulations et procédés qui symbolisent pourtant les tragédies françaises à peine cicatrisées.
C’était une leçon de Nzinga Taubira. Comparé au lugubre politique ambiant qui comme par envoûtement ôte l’esprit critique le plus simple à ceux qui avaient laissé attendre tellement mieux d’eux, la députée de Guyane offre au moins une esthétique politique de résistance entretenant le flambeau de l’espoir. En espérant qu’elle sera bientôt accompagnée par ceux n’ont toujours pas fait foule…
Source: Africatime