Une entreprise sénégalaise met à jour l’un des gisements aurifères les plus riches de ce pays. Avec une expertise et des capitaux totalement nationaux. Un gisement aurifère d’un potentiel de 578 649 onces d’or, soit l’équivalent de 18 tonnes, a été découvert sur le périmètre de Niamia occidental, par la Société de recherches et de développement des mines (Sored Sa). C’est l’un des plus gros gisements d’or jamais découvert au Sénégal, et il l’a été par des ingénieurs sénégalais, se félicitent les responsables de la Sored. Néanmoins, ils tiennent à préciser que la taille réelle du gisement ne sera vraiment connue qu’après développement, même s’ils notent, à l’étape actuelle, «de réelles possibilités d’extension en surface et en ouverture». Cela rappelle qu’il y a un an, lors de la visite du ministre des Mines dans la région minière, l’ingénieur de la Sored, M. Cheikh Tidiane Diop, confiait déjà à Madické Niang que le périmètre avait un potentiel d’un million d’onces environ. Un potentiel bien plus important que celui des gisements trouvés du côté de Sabodala, si l’on se base sur les chiffres. Mais, pragmatiques, les investisseurs ne veulent baser leur plan d’affaires que sur le gisement concrètement estimable.
Déjà, aux cours actuels de l’or sur le marché, les 18 tonnes confirmées représentent un potentiel d’environ 150 milliards de francs Cfa, équivalent à 300 millions de dollars américains, estiment les spécialistes. Cette perspective permet de fermer, sans trop d’efforts, les yeux sur les près de 4 milliards dépensés déjà dans les travaux de recherche et de prospection. «Mais je crois que le plus difficile est derrière nous», se réjouit l’administrateur de la Sored Sa. Les sondages ont été réalisés par l’une des plus grandes sociétés en la matière, la Boat Longyear. Et les analyses ont été faites par SGS Analabs, qui a délivré ce que l’on appelle dans le jargon, les Quality control reports (les rapports de contrôle de qualité). Il n’empêche, disent les initiateurs, le projet ne va pas directement passer à la phase d’exploitation du jour au lendemain, car il y a de nombreuses étapes à respecter. M. Ahne explique, par ailleurs, que les montants nécessaires à la mise en exploitation du gisement ne peuvent être chiffrés à l’étape actuelle.
L’autre motif de satisfaction de Pape Ousmane Ahne semble être que cette découverte ne doit rien, sur aucun plan, à une participation étrangère. La Sored est une société de droit sénégalais, dont le capital est détenu à 100% par des personnes morales et physiques sénégalaises. A côté de Pape Ousmane Ahne, le banquier Abdoul Mbaye a franchi le pas et mis certaines billes dans l’affaire. Outre ces deux têtes d’affiche, il y a la société Capital finances, ainsi que des entreprises américaines et européennes, «dont le capital est détenu entièrement par des Sénégalais de la Diaspora». Une manière de démontrer que des Sénégalais croient aux potentialités de leur pays, et possèdent l’expertise nécessaire pour produire de la richesse et créer des emplois, sans avoir besoin de chercher ailleurs ce qu’ils peuvent avoir sur place.
Revanche sur l’Histoire ?
Sur ce point, d’ailleurs, Pape Ousmane Ahne est en lui-même un exemple d’abnégation. Les succès de la Sored, qu’il tient absolument à faire admettre à tous qu’ils sont les fruits d’un travail d’équipe, «dans lequel, tout au plus, je n’aurais joué qu’un rôle d’animateur», sont pour lui une sorte de revanche.
L’exploitation industrielle de l’or au Sénégal a, depuis une dizaine d’années maintenant, collé le nom de Sabodala à celui de Pape Ousmane Ahne. Le personnage est de ceux qui nourrissent les légendes. La presse a tellement relaté en long et en large les péripéties qui ont entouré son expropriation des gisements qu’il exploitait sur le site qui a été attribué à la société australienne Mineral Ore deposit Ltd (Mdl) qu’il n’est plus nécessaire de revenir dessus. Ni, non plus, sur les détails de ses déboires avec le régime de Diouf, dont on a, pendant longtemps, pensé que le jeune frère Magued avait des comptes personnels à régler avec le personnage. Ses sorties contre tous ceux qui ont voulu se partager ses biens sont encore dans les mémoires. Mais aujourd’hui, le nouveau challenge semble l’avoir transformé. Il assure n’avoir plus rien à prouver dans le domaine de la recherche aurifère au Sénégal. il assure : «Mon ambition personnelle, au-delà de tout, est que le tribunal de l’Histoire puisse avoir un jugement positif à mon endroit.» De ce fait, il semble écarter tous les rappels négatifs d’un revers de la main : «Ce qui est devant nous est plus important que ce qui est passé. Nous voulons définitivement mettre derrière nous ce qui nous a retardé depuis plus de 9 ans», assure-t-il.
Il ne veut voir, dans son aventure d’aujourd’hui et dans la découverte réalisée, que la marque d’une riche collaboration franche et forte de plusieurs individualités à l’expertise avérée, chacun dans son domaine. Cette collaboration s’est manifestée même au niveau des rapports avec les pouvoirs publics.
La Sored a ainsi tenu à réserver la primeur de sa découverte au chef de l’Etat. Et il est dit que le Président Wade les aurait félicités et assurés de tout son soutien dans leur travail. De l’autre côté, la direction des Mines a fait montre d’une grande disponibilité et d’une sincère collaboration, assure M. Ahne. «Depuis le début de ce programme en 2004, la Sored n’a rencontré aucune difficulté de la part de ce service, il faut le reconnaître», souligne-t-il.
Mohamed GUEYE
Source: Le Quotidien