Pour rappel, c’est l’intrusion de troupeaux appartenant à des pasteurs maures dans les plantations de paysans négro-mauritaniens, qui avaient mis le feu aux poudres et conduit à l’une des premières crises majeures de la sous-région. Cette crise intra-mauritanienne a conduit à de cruelles exactions : tueries massives, arrachement des populations négro mauritaniennes à leur terre, et l’exil forcé pour certains, dont de nombreuses personnes ne reviendront jamais. Maintenant que le monde entier croit que les germes du racisme et de l’injustice, qui ont été à la base de la précédente crise, sont à jamais éradiqués, couve en Mauritanie un nouveau conflit.
«C’est, à en croire des sources mauritaniennes, la destruction des plantations maraîchères de femmes négro-mauritaniennes du village de Garack qui est à l’origine du conflit». Village situé à une dizaine de kilomètres de Rosso Mauritanie, Garack, village mythique du Waalo, a été fondé il y a 370 ans et, est peuplé de Toucouleurs, de Ouolofs et de Soninkés. Dans la nuit du mercredi 26 au 27 décembre 2007, sans surveillance, un troupeau en divagation a fait irruption dans les plantations fruitières des femmes. Après y avoir passé la nuit, le même troupeau est revenu sur ses pas dans la nuit du jeudi au vendredi, avant que le vigile, chargé de la sécurité des plantations, ayant surpris le troupeau, s’est rendu dans le village pour réveiller les femmes afin qu’elles constatent le spectacle. Au nombre de 450, ces femmes, Ouolofs et Toucouleurs pour la plupart, ont conduit le troupeau dans le village et l’ont parqué en un lieu sûr où, à tour de rôle, elles ont monté la garde.
Au petit matin, après avoir pris le chef du village à témoin, elles sont allées porter plainte à la brigade de gendarmerie de Rosso Mauritanie. «Selon Mme Codou Diagne, présidente des femmes, le commandant avait montré toute sa disponibilité et a demandé aux femmes de garder le troupeau jusqu’à ce que le propriétaire se manifeste». Après avoir cherché ses 40 boeufs, le propriétaire a fini par retrouver ses animaux sous la surveillance des femmes. Informé de la nature du préjudice que son bétail a fait subir aux femmes, il essaiera de trouver un terrain d’entente en proposant de payer. «Mais, assure Codou Diagne, ce qu’il nous a proposé est tellement insignifiant que nous avons refusé sa proposition. Faute de trouver un terrain d’entente avec nous, il nous a dit que le préjudice ne serait pas réparé». Comme promis, le pasteur s’est dans la journée du jeudi, rendu auprès du commandant de brigade.
Le contenu de leur discussion ne sera connu ni des agricultrices ni de nous, malgré nos différentes tentatives d’entrer en contact avec le chef de la brigade de gendarmerie. Interpellé par nos soins, le commandant de la brigade a fait savoir qu’il a agi sur la base des résultats du constat qu’un technicien de l’agriculture lui a donné. Au sortir de cet entretien qu’il a eu avec le pasteur maure, en plus d’une convocation en bonne et due et forme envoyée à la présidente de l’association des femmes, «un pseudo technicien» en agriculture a été dépêché sur les lieux pour faire un constat. Moins d’une heure après la visite du pasteur, le commandant intimera l’ordre aux femmes, sous peine d’arrestation, de libérer tous les animaux. Lésées, bafouées et humiliées, les femmes du village de Garick ont décidé de se battre. Elles sont, dans ce combat, rejointes par l’avocate Me Fatimata Mbaaye du barreau de Nouakchott et Awomi, african women millenium initiative, dirigée par Mme Yacine Fall.
Source: Africatime