Les Soninkés sont des voyageurs dans l’âme. Depuis des siècles, les Soninkés « bourlinguent » à la recherche de subsistance pour nourrir familles et proches. Véritables chasseurs de devises, ils se caractérisent par leur solidarité légendaire. Quel que soit le pays d’immigration, les Soninkés optent pour la vie en communauté et créent une chaîne de solidarité et d’entraide. Une façon de « reconstruire » le village où qu’ils puissent être. Qu’ils soient du Sénégal, du Mali, de la Mauritanie, de la Gambie, les Soninkés partagent la même langue et la même culture. En terre d’immigration, ils restent fortement attachés à leurs « régions d’origine », une identité particulière qui constitue une passerelle vers le cousinage à plaisanterie. Une richesse du monde Soninké qui permet de raffermir les liens et de vivre paisiblement.
Les régions Soninkés sont à cheval sur plusieurs pays. Le Gajaaga s’étend de Gandé, en terre Sénégalaise à Kéniou, en terre Malienne. Le Hayré regroupe plusieurs villages sénégalais et mauritaniens. Le Guidimakha est constitué de villages Maliens et Mauritaniens. Au Mali, on dénombre d’autres régions comme Diafounou, Kaarta, … Toutes ces régions ont l’avantage de polariser plusieurs villages au destin commun. Elles sont toutes fortement représentées en Europe. Ils vivent en parfaite harmonie en Europe, en Amérique et en Asie. Les nationalités disparaissent au profit d’une seule identité : « Soninkara » ( le monde Soninké).
Autrefois « obnubilés » par l’or et le diamant de l’Afrique Centrale, les Soninkés se sont ensuite dirigés vers les pays d’Europe et les USA voire l’Asie. Fortement représentés en Europe ou au pays de l’Oncle Sam, les Soninkés ont longtemps séjourné en Afrique centrale avant les guerres civiles qui ont causées le déclin des pays de cette partie du berceau de l’humanité. L’Afrique fût d’abord l’Eldorado de « Soninkara » avant que les valeureux hommes Soninkés, tant chantés par le célèbre parolier Ganda Fadiga, découvrent les ports de Marseille, du Havre, de Dunkerque, de Bordeaux… Ici, il s’agit de la cohorte des grands « navigateurs » Soninkés, riches comme crésus, d’une générosité légendaire qui ont fait les beaux jours de la Marine Marchande Française. Ils ouvrirent une voie royale vers l’Europe. Ainsi commença la ruée vers les pays d’Europe notamment la France. Partir quel que soit le prix à payer devient une « tradition ». Quiconque n’amenait pas son frère, son fils en terre d’immigration s’attirait les foudres de sa famille et de ses proches. Pour le Soninké, émigrer est devenu une évidence, une trajectoire normale voir infaillible. Qu’il soit inscrit à l’école française ou qu’il soit disciple d’école coranique, l’enfant Soninké rêve d’une seule chose : « Emigrer ».
Par village, par lignée familiale, les Soninkés s’organisèrent dans l’immigration. C’est l’avènement des caisses villageoises. D’abord mises sur pied pour le rapatriement des corps, elles sont devenues, selon les demandes locales, la principale source de l’investissement social. Elles ont construit des centres de santé, des écoles, des mosquées, des marchés… Elles ont financé la construction des forages dans plusieurs villages pour le bien-être des populations locales. En plus de ces retombées très positives, l’émigration a jugulé bien des maux. Elle nourrit, soigne, vêt et construit. Les maisons en pissé et les cases ont laissé la place au béton grâce aux revenus de l’émigration. L’opulence des villages Soninkés n’est plus à démontrer. Les émigrés ont fait mille fois mieux que l’Etat . C’est peu de le dire.
Toutefois, cet engouement pour l’émigration n’est pas sans conséquence au niveau des villages d’origine. C’est la fuite des « hommes valides ». « Soninkara » s’est vidé de ses âmes. Avec le regroupement familial, les enfants Soninkés naissent désormais dans la diaspora. Beaucoup d’entre eux sont nés de nationalité « Européenne » ou « américaine » dans plusieurs villages Soninkés. Ils sont ainsi « conditionnés » à l’aventure dès leur naissance. Les jeunes femmes rejoignent leurs maris en terre d’immigration. A la retraite, les vieux Soninkés, en grande majorité, deviennent prisonniers de leur situation familiale. Difficile de rentrer en laissant une progéniture jeune et insouciante derrière soi. Les plus fortunés, une fois au pays, s’éloignent du village pour le confort des capitales africaines. Pour apporter de l’eau à mon moulin, il suffit de s’intéresser au peuplement Soninké dans les grandes villes de l’Afrique de l’Ouest notamment au Sénégal, au Mali et en Mauritanie. Plusieurs vieux Soninkés, de retour au bercail, investissent dans l’immobilier et s’installent durablement dans les capitales. Cela a accentué le départ massif des Soninkés de tout âge des villages vers les capitales. Des maisons se sont « vidées ». On y trouve désormais que les jeunes femmes, les adolescents, les enfants et les personnes du troisième âge ainsi que quelques retraités. Pire, certaines maisons sont même « mises sous tutelle » étrangère. Des travailleurs saisonniers qui venaient chercher leur « subsistance » à leur tour dans les villages Soninkés gagnèrent la confiance de plusieurs émigrés et finirent par détenir la chefferie de la maison. Désolation, insécurité, nostalgie et dégradation des mœurs deviennent le quotidien des villages Soninkés. Le décor est planté. C’est le nouveau visage du monde Soninké dans les pays d’origine. L’heure est grave. Les cœurs sont meurtris. De plus en plus de Soninkés se posent la question suivante : « L’émigration de nos terres d’origine, n’a-t-elle pas plus de cotés négatifs que positifs ? ». La réflexion s’impose. Comme le dit l’adage « Quand on ne sait plus où l’on va, on retourne d’où l’on vient ». Une « Alya » (Terme désignant le retour des juifs vers Israél ) à la Soninké s’impose. Ce fût le sujet d’une émission radio dans « Leminaxu bera » (La tribune des jeunes ) sur les ondes de la Web Radio soninkara.com pendant deux Dimanche.
Créer les conditions de retour au bercail et casser la dynamique de départ pour l’émigration : telles furent les deux principales questions auxquelles il fallait trouver des solutions idoines. Ainsi, nous fûmes invités à trouver les voies et moyens possibles pour permettre cette « Alya » à la Soninké.
« Repeupler » les villages Soninkés et arrêter la « saignée » de l’émigration passent nécessairement par le changement des mentalités et une nouvelle approche de l’investissement local. Par changement de mentalité, il faut comprendre le refus de « se condamner » à l’échec dans sa terre natale. Refuser de croire que la réussite n’est possible qu’en quittant son terroir. Cela passe également par une « confiance en soi », le goût pour le travail et la persévérance. S’inscrire dans le long terme quel que soit le domaine où l’on veut travailler. Un industriel américain disait : « Si l’on n’investit pas dans le long terme, il n’y a pas de court terme ». Il faut se départir de l’idée de récolter les fruits d’un labeur dès les premières heures de son action. Après avoir opéré ce changement, le Soninké doit apprendre la culture d’entreprise. Comme le disait l’industrielle britannique Anita RODDICK : « Je ne veux pas uniquement quelque chose où investir. Je veux quelque chose à laquelle je puisse croire ».
Le premier volet de l’investissement local Soninké pour fixer les candidats à l’aventure est de « détourner » l’argent des caisses villageoises de leurs missions premières. Nous le disions tantôt que les caisses villageoises servent au rapatriement des corps et à l’investissement social au niveau local (Centre de santé, Ecoles, Forages ). Il faut que cela cesse sans délai ! « We need to make money ». Nous devons investir l’argent pour avoir de l’argent. Nous avions assez travaillé à la place de nos Etats. Stop ! Soninkara doit opérer une rupture. Nos caisses villageoises, alimentées depuis les premières générations dans les années 70, doivent servir désormais de « base » pour l’implantation d’un tissu économique local. Ce matelas financier doit être utilisé pour la création de richesses locales à grande échelle.
Aujourd’hui, les liquidités de nos caisses villageoises font tourner, dans une certaine mesure, l’économie européenne. Cette manne financière qui « dort » dans les comptes ne sert qu’aux établissements financiers. Il est l’heure de mobiliser intelligemment ces liquidités dans nos localités pour créer de la richesse locale à plusieurs niveaux. Cela passe tout d’abord par le micro-crédit à la « Muhammad Yunus » qui servira à financer les petites exploitations agricoles, l’aviculture, l’artisanat, les commerces. Prenons un exemple pour mieux illustrer notre propos :
Intéressons-nous aux deux « goyes » du département de Bakel. Le « goye » supérieur s’étend de Koughany à Aroundou ( Koughany, Golmy, Yafera, Ballou, Aroundou ). Le « goye inférieur » va de Tuabou à Gandé ( Tuabou, Manael, Yellingara, Diawara, Moudery, Galladé, Gandé). En y ajoutant la ville de Bakel, on constitue un ensemble de 13 localités au destin commun. Aujourd’hui, ces villages sont bien « connectés » aussi bien localement qu’au niveau de la diaspora. Ces villages se connaissent tous et partagent plusieurs choses. Il manque juste une cohésion à l’échelle fédérale qu’il faudra bâtir.
Si chaque caisse villageoise mettait sur la table 10.000 euros, nous nous retrouverions avec 130.000 euros ( 85.000.000 FCFA ) sachant que plusieurs de ces villages ont déjà plus de d’une centaine de milliers d’euros dans leurs comptes. Pour rappel, les caisses villageoises sont alimentées chaque année par les ressortissants vivant dans la diaspora. En moyenne, chaque villageois s’acquitte d’une centaine d’euros par an. Cela varie entre 40 euros et 150 euros par an selon l’ossature des villages. Selon les règles en vigueur dans certains villages, chaque homme en âge de travailler doit cotiser. A quoi vont servir ces 85.000.000 FCFA issus des 13 caisses villageoises ?
Premièrement, ces liquidités peuvent servir à la mise en place d’une structure de micro-crédit. Les conditions d’implantation d’une banque étant plus compliquées, optons pour ce type d’ établissement financier d’épargne et de crédit. Cette unité financière viendra en soutien aux porteurs de projets locaux dans divers domaines mais proposera également des comptes courants et des comptes d’épargne. Pour être plus concret, ciblons les secteurs prioritaires susceptibles de bénéficier de cette structure financière.
Agriculture :
C’est le moteur de nos villages. Nos paysans doivent devenir des agriculteurs, des professionnels. L’accès aux financements leur permettra d’augmenter leur capacité de production et de diversifier leur activité. Chaque « sérieux » exploitant agricole, selon la pertinence de son projet, bénéficiera d’une ligne de crédit pour investir dans du matériel agricole et dans l’aménagement agricole moyennant une quelconque garantie. Comme il s’agit d’ « argent communautaire », nous exigerons aux demandeurs de fournir une garantie afin de mettre des gardes fous et de bénéficier d’ une caution. Ainsi, chaque émigré pourra garantir son frère voire son proche parent par un système classique. Le garant doit justifier auprès des responsables de la « grande caisse » une activité salarié ou des biens immobiliers ( Terrain, matériels…). Ainsi, nous pourrons sécuriser nos lignes de crédit à partir d’un certain montant. Par exemple, chaque demande de crédit supérieur à 1.500.000 FCFA sera soumis à une garantie. En cas d’échec, l’établissement se rattrapera sur le bien du demandeur. Cela permet de séparer le bon grain de l’ivraie. Un comité regroupant les représentants techniques de chaque village sera mise en place à la création de cette structure pour étudier minutieusement chaque projet afin de ne pas mobiliser les ressources sur des investissements toxiques. Nos juristes, nos financiers et autres experts dans divers domaines de l’entreprise constitueront la tête pensante de ce type de structure. Un cadre juridique devra être établi pour la création de cet établissement financier.
Dès lors, les petits exploitants agricoles pourront bénéficier de ressources financières pour produire à grande échelle et vendre le fruit de leur labeur. Le riz local sera valorisé. Les émigrés étant les « sèves nourricières » de nos villages exigeront la consommation quotidienne du riz local. Ce sera l’avènement du « protectionnisme » soninké. Nous en ferons de même avec les producteurs des autres céréales.
En prolongement de ces activités de production céréalière, les artisans locaux pourront disposer également d’une ligne de crédit pour financer l’achat d’unités de transformation de céréales : moulins à mil, moissonneuses-batteuses…
Le maraîchage sera également une branche prioritaire. Aujourd’hui, nombreux sont les exploitants agricoles qui excellent dans ce domaine. Il s’agit de mettre des financements à disposition pour l’achat de semences, de matériels comme les motopompes et d’autres d’outils agricoles. Ainsi, les acteurs de ce secteur pourront augmenter et diversifier leurs productions. Nos marchés locaux seront abondamment fournis en légumes et autres cultures. Plus tard, nous irons à la recherche de marchés étrangers.
Pour mieux professionnaliser le secteur, des lignes de crédit seront également mises à disposition des porteurs de projet dans le domaine du froid, de la transformation et dans la confection d’emballages. Il s’agit de financer la création de gros matériels de stockage de produits frais issus du maraîchage. Par ailleurs, comme ce secteur aura besoin également d’emballages de toute sorte, les artisans locaux ( tailleurs, menuisiers-ébénistes, Menuisiers métalliques) pourront bénéficier de financements pour l’achat de machines capable de confectionner des emballages pour les fruits, les légumes et les produits dérivés.
Plus tard, ces activités auront besoin de matériels roulants pour le transport et la distribution des produits issus de l’agriculture. La suite coule de source. Il s’agira de financer les jeunes dans l’achat de véhicules de livraison pour relier convenablement les zones de production, de stockage et de distribution. Toute une chaîne qui permettra de créer des emplois qui fixeront plusieurs jeunes dans nos localités. Il suffit de ne pas avoir « les yeux plus gros que le ventre ». D’un autre côté, nous aurons mis en place un établissement financier viable qui sera basé durablement sur trois volets que sont : le crédit, la gestion des comptes courants et l’épargne.
Mieux, quand nous aurions « huilé » ce système de partage de richesses financé « par nous et pour nous », nous lancerions la création d’une chaine de supérettes voire de supermarchés. Les caisses villageoises resteront toujours les bailleurs de fonds. Il s’agit là de créer des centres commerciaux capables de capter la manne financière qui sort de nos poches. La vocation de ces supérettes ou de ces supermarchés est de réduire des couts d’achat des denrées de première nécessité dans un premier temps. Ici, il s’agira d’aller négocier directement les prix avec les usines de production. Nous supprimerons ainsi les intermédiaires et leurs marges. Le prix de revient de ces produits seront dés lors très abordables dans nos localités. Les productions locales seront également en bonne place dans nos rayons. Nous investirons plus tard d’autres marchés comme les matériaux de construction, l’énergie et les services.
Transports :
Dans ce domaine, nous avons fort à faire. Aujourd’hui, sans entrer dans des « considérations chauvines », notre sécurité est « sous tutelle ». Les transporteurs qui exploitent le tronçon Région de Tambacounda-Dakar prônent l’argent au détriment de la sécurité. Inutile de revenir sur les nombreux accidents dramatiques qui ont emportés plusieurs de nos parents. Aujourd’hui, l’heure est venue d’exploiter cette « niche ». Je continue à considérer le transport comme une « niche » parce que les intervenants dans ce secteur sont très mal organisés et sont loin de satisfaire la demande croissante. Dans ce domaine, les caisses villageoises ont beaucoup à faire. Il nous faut une régie de transport en commun. Dans chaque ensemble de villages frontaliers, nous pouvons créer notre propre régie de transport. Prenons encore le cas du département de Bakel.
En fixant la participation par village à 20.000 euros, nous disposerons d’une manne financière de 260.000 euros. Une somme conséquente capable d’acheter trois à cinq bus de transport en commun confortables et fiables. Ces bus permettront de sécuriser nos vies car la vocation première n’est pas le gain mais la satisfaction d’une demande locale et d’investir un « marché porteur ». Plus tard, quand nous aurions bien maitrisé le transport interurbain reliant Bakel aux autres villes du pays, nous investirons dans le transport inter villages. Il s’agit là de mettre de manière quotidienne des bus entre Bakel et les deux « goyes ». Cette entreprise de transport sera un nid d’emplois en amont et en aval. Nous aurons besoin de chauffeurs, de mécaniciens, de receveurs, d’agents d’entretien… Plusieurs jeunes de nos localités pourront ainsi bénéficier d’emplois correctement rémunérés. Des potentiels candidats à l’émigration seront fixés durablement sur place. Cela contribuera à sécuriser nos maisons et à infléchir la forte contribution de nos émigrés dans l’entretien des familles. Leurs épargnes pourront être investis dans d’autres domaines rentables au détriment de la consommation courante.
Santé :
Les caisses villageoises ont beaucoup fait dans ce domaine. Plusieurs centres de santé portent la signature de la diaspora. Il est temps d’orienter nos « épargnes villageoises » vers d’autres types d’investissement. Aujourd’hui, la santé est un poste très onéreux pour les familles. En plus des frais de santé, nous supportons d’autres charges à savoir le transport entre nos zones et les capitales et l’hébergement sur place. Et si nous financions la construction d’un centre hospitalier privé voire une clinique digne de ce nom ? En additionnant nos efforts, nous pouvons construire un établissement de santé de dernière génération avec des équipements de haute qualité. Ce aura un double avantage pour nos populations. Un tel établissement permettra de réduire la facture de santé et de créer plusieurs emplois. Nous pouvons soigner nos familles sur place. Cela évitera de mobiliser des ressources financières pour le transport et l’hébergement de nos malades. Pour ce faire, nous devrons créer les conditions pour attirer les meilleurs spécialistes quel que soit le domaine. Aucune contrainte ne peut exister. Ces spécialistes, à défaut de venir exercer quotidiennement sur place, peuvent venir un ou deux jours dans la semaine pour soigner les populations. Ainsi, Transair, nouvel exploitant de la destination Dakar-Tamba depuis lundi 26 Janvier 2014, deviendra un réel partenaire pour convoyer ses spécialistes dans notre établissement de santé de dernière génération. C’est loin d’être un rêve. Notre offre de santé sera basée sur les maladies chroniques présentes dans nos zones sans oublier le cancer et autres maladies infectieuses qui sévissent dans le monde entier. A ce moment-là, nous ferons un grand pas en avant pour le développement dans le vrai sens du terme.
La demande dans le domaine de la santé a explosé dans nos localités ces dernières décennies. En plus des villages environnants, plusieurs populations de la zone frontalière ( Mali, Mauritanie…) viennent se soigner à Bakel. La question de la rentabilité ne se pose guère. Il suffit juste d’investir fortement dans la maitrise de l’énergie en amont pour sécuriser les équipements et d’attirer les meilleurs spécialistes.
Par ailleurs, nous créerons plusieurs emplois dans divers domaines : Infirmiers, aides-soignants, ambulanciers, agents d’entretien. Il sera alors question d’investir en amont dans la formation dans le domaine de la santé. La balle sera dans le camp des parents et des élèves pour s’orienter vers ce domaine. Nous aurons rempli notre mission quand nos frères et sœurs vivant dans la diaspora traverseront l’atlantique dans le sens inverse pour venir occuper des postes dans nos diverses entreprises.
D’autre part, comme notre objectif principal est d’infléchir la courbe des départs ( exode rural, émigration…), chaque émigré doit devenir créateur d’emplois locaux. A côté de ces investissements communs de grande envergure, les émigrés devront changer de « modus opérandis ». Aujourd’hui prompts à investir dans la venue d’un frère en terre d’immigration ou dans l’immobilier, ces émigrés devront orienter leurs richesses vers la création d’entreprises. De nos jours, il faut débourser environ 3.500.000 FCFA pour faire émigrer un frère vers l’Europe. Et si on fructifiait cet argent en investissant localement ? Prenons un exemple pour étayer nos propos. Que peut-on faire avec 3.500.000 FCFA dans notre localité ?
D’un commun accord avec un jeune candidat à l’émigration, nous pourrons tester l’investissement local. Avec le concours de la structure de micro-crédit souhaitée au début de notre analyse, l’émigré et son frère peuvent bénéficier d’une ligne de crédit en mettant à contribution leur apport. Avec cinq à six millions de Franc CFA issus de leur apport et le crédit octroyé par l’organisme de micro-crédit local, ces deux frères peuvent investir dans du matériel de boulangerie de bonne qualité. Que leur faut-il pour démarrer une telle activité ?
-Local aménagé
– Matières premières
– Energie
-Chambre froide ou réfrigérateurs
– Camion de livraison.
Son produit sera le pain. Nous consommons le pain le matin et le soir. Une demande qui croit depuis l’abandon de la bouillie matinale et le couscous dinatoire. Avant de démarrer l’activité, on lui trouvera un stage dans une boulangerie de la capitale pour qu’il apprenne la chaîne de production. Quand il aura maitrisé les bases du métier de boulanger, il commencera son activité en mettant toutes ses tripes sur la table. Il doit y croire jusqu’à la dernière minute et doit se comporter en chef d’entreprise. Il devra trouver des distributeurs ( Boutiquiers, Restaurateurs, grandes familles, Services administratifs…) av démarrage de la production en usant de la communication. Une étude de marché devra également être effectué. Après avoir trouvé une clientèle, il devra diversifier son activité en intégrant des frères ou des cousins qui auront également fait une formation dans un autre domaine comme la « Pâtisserie », « La restauration rapide ». Cela permettra de multiplier le chiffre d’affaires par 2 voire 3. La boulangerie et la patisserie le matin, la restauration le soir. Il faudra attendre 3 à 4 ans pour le retour d’investissement car les premières années serviront à rembourser son crédit et l’apport personnel. Un investissement à moyen terme qui permettra à plusieurs villages de fixer plusieurs jeunes. Ainsi, on pourra créer des chaines de boulangerie et de restauration dans plusieurs localités de la sous-région .
D’autres domaines seront à explorer comme l’aviculture, l’aquaculture, l’élevage de bovins et d’ovins. Cela permettra également de fournir nos marchés locaux en viande et en poisson. La suite logique sera l’implantation de boucheries, de poissonneries et restaurants modernes dans nos localités.
En conclusion, les conséquences de l’émigration imposent un changement de mentalité dans le monde soninké. Dans les pays d’immigration, ils rencontrent très souvent d’énormes problèmes qui mettent en danger leur identité culturelle. L’éducation des enfants pose problème dans l’immigration. Les réalités soninkées sont de plus en plus en décalage avec les lois des pays d’accueil. Le rapport homme/femme a considérablement changé. En occident, l’homme abandonne de plus en plus son pantalon au profit de la femme. Ainsi, des vies sont quotidiennement « brisées » au nom de la protection des femmes et par défaut de « papiers « en règle ».
Malgré leur bravoure et leur générosité, les Soninkés arrivent difficilement à joindre les deux bouts dans l’immigration depuis quelques années. Le mal du pays s’installe durablement. Ils se lamentent quotidiennement des dures conditions de vie dans les pays d’immigration. Le quotidien des « retraités » démoralise. Il devient de plus en plus suicidaire de vieillir dans l’immigration car l’avenir est plus qu’incertain.
Ainsi, il devient intéressant de capitaliser les moyens et les efforts dans les « régions » d’origine afin de créer un autre monde. Chaque grand ensemble de villages soninkés de part et d’autre des frontières mauritaniennes, maliennes et sénégalaises devra s’organiser pour investir et gagner ensemble. Cela passe par la mobilisation de la manne financière des caisses villageoises au niveau des contrées d’origine et des investissements individuels. Hâtons-nous donc ! Les occidentaux et les chinois ont conscience que l’Afrique est l’avenir. Depuis quelques années, ils mobilisent le reste de leurs ressources dans nos contrées. Soyons vigilants ! Si nous prenons pas garde, nous risquons d’être encore la main d’oeuvre corvéable du nouveau capitalisme à la sauce africaine.
L’autre point essentiel non évoqué dans l’analyse et qui paraît comme une évidence est l’investissement dans les études supérieures. Nous devons épauler nos enfants dans les études afin qu’ils fréquentent les grandes écoles. Ainsi, ils pourront faire partie de la race des futurs dirigeants de ce monde. Politiquement et économiquement, nous aurons des « ambassadeurs » de haute qualité pour consolider notre économie locale.
NB : Cette analyse est issue d’un « brainstorming » lors d’une émission radio « Leminaxu Bera » sur la Web Radio soninkara.com. C’est une réelle volonté manifestée par les Soninkés du monde entier. Ils sont installés en Europe, en Asie, en Amérique et en Afrique.
Source :Bakelinfo/Samba Fodé KOITA dit Makalou/Eyo